Noah 83 dans « L’Équipe » (15/15) : Conférence de stress

7 décembre 1983 : fin de saison 1983. Mis à part son quart à l’US Open, Yannick Noah n’a remporté que deux matches depuis Roland­-Garros. Blessures et coups de blues ont rythmé ses derniers mois. Il a convoqué la presse dans un hôtel parisien. Et là…

Malaise hier en fin d’après-midi dans les salons de l’hôtel Sofitel-Sèvres à Paris. Yannick Noah y avait donné rendez-vous à la presse. On attendait un débat musclé à la suite des reproches qu’il avait adressés aux journalistes, rendus en partie responsables de son départ pour les États-Unis (*).

En fait, micros, caméras, stylos et leurs manipulateurs eurent la surprise de trouver face à eux un Noah beaucoup plus déprimé qu’agressif. Un Noah, larmes aux yeux, qui avoua même avoir nourri ces derniers jours des idées de suicide. Un Noah qui, visiblement, supporte de plus en plus mal d’être le point de mire du public, qui réagit d’une manière émotive, disproportionnée aux yeux de beaucoup, à une somme de sollicitations croissantes depuis sa victoire à Roland-Garros : « Peut-être que n’importe qui à ma place réagirait différemment, avoua-t-il. Moi, je lis tout ce qui s’écrit sur moi. J’ai peut-être tort. Mais je ne triche pas. Je connais des types qui, à ma place, jouent le jeu, qui rient beaucoup en public, et qui, une fois rentrés chez eux, ont les boules. D’autres qui aiment ça. Moi ce n’est pas mon cas. C’est trop lourd à porter. »

Il revient sur sa décision de quitter la France pour New York : « Ce n’est pas un départ définitif. Ma maison est en France. Ma famille est en France. Je parle français. Ça me fait mal quand je lis que je pars pour « m’éclater » à New York ; ou quand un chauffeur de taxi me demande si ce n’est pas plutôt pour mes ­impôts. Qu’on ne me parle surtout pas de fric ! Ça ne me fait pas partir. À New York, je peux prendre le ­métro, marcher dans la rue. Je me donne comme objectif de jouer le mieux possible au tennis. Je ne me plains pas. Je ne suis pas un martyr. Je tente une expérience. En restant ici, je patauge. Je pense même à tout arrêter. »

(*) Il a annoncé quelques jours plus tôt son « exil » à New York, pour fuir la pression, médiatique et populaire.

Épilogue : Noah ne retournera jamais en finale d’un tournoi du Grand Chelem mais atteindra la 3e place mondiale en 1986. Il prendra sa retraite sportive en 1991, année du sacre en Coupe Davis comme capitaine de l’équipe de France mais aussi de son premier tube, Saga Africa.

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